Emmanuel Macron a promulgué la réforme des retraites dans la nuit. « Irresponsable », tonnent ses adversaires.
POLITIQUE – Pendant que la France dormait, il promulguait. Dans la nuit du vendredi 14 au samedi 15 avril, Emmanuel Macron a promulgué la réforme des retraites, quelques heures après le feu vert partiel donné par le Conseil constitutionnel. C’est donc acté, la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, incluant le report de l’âge légal de 62 à 64 ans, est inscrite au Journal officiel.
Une procédure rapide et à rebours de ce que réclamaient les syndicats, qui demandaient au chef de l’État de temporiser, puisqu’il disposait théoriquement de quinze jours pour le faire. Tout comme les groupes de la NUPES à l’Assemblée, qui ont solennellement demandé à Emmanuel Macron d’activer l’article 10 de la Constitution permettant un nouveau vote au Parlement. Un courrier qui n’aura survécu que quelques heures.
Sans surprise, le réveil est difficile pour les opposants à la réforme, qui voient dans cette promulgation express un « hold-up démocratique », comme le qualifie François Ruffin. « Cette brutalité marque, en fait, leur fragilité. Ils appartiennent déjà au passé », a réagi sur Twitter le député LFI de la Somme. « Ça dit quelque chose de sa fébrilité, 3 heures 28 du matin pour promulguer, ce n’est pas banal », a commenté sur France inter le premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure.
« Absurde affichage d’arrogance »
« Là où le Président pense passer à la suite, la réalité c’est que lui-même est dans une fuite en avant mais que les Français ne le laisseront pas faire », a poursuivi le chef de file du PS. « Cette décision met notre démocratie en danger. C’est irresponsable de la part du gouvernement et du Président de la République », a renchéri sur Twitter l’écologiste Sandrine Rousseau.
« Voleur de vie ! », a ajouté Jean-Luc Mélenchon, voyant dans cette promulgation nocturne un « absurde affichage d’arrogance ».
À droite, cette décision a également du mal à passer, notamment dans la forme. « C’est la droite ligne de la méthode du gouvernement, qui consiste à brusquer les Français », a réagi sur franceinfo le député LR du Pas-de-Calais, Pierre Henri Dumont. « Le président de la République aurait très bien pu, lors d’une allocution d’ici quelques jours, qu’il allait promulguer la loi », ajoute celui qui faisait partie des députés LR réfractaires à la réforme.
Même son de cloche du côté syndical. « Dans la nuit, c’est surprenant et choquant. Ça fait une fois de plus un signe de provocation », a réagi sur BFMTV Cyril Chabanier, président de la CFTC. « L’intersyndicale a demandé d’attendre avant que cette loi soit promulguée, le Président n’écoute pas et le fait à quatre heures du matin en urgence », a déploré le leader de ce syndicat réformiste. « C’est une décision totalement honteuse », a fustigé sur franceinfo la secrétaire générale de la CGT Sophie Binet. « Cela confirme le violent mépris du président pour la population et les organisations syndicales », a-t-elle déploré.
Au sein du gouvernement, Franck Riester, ministre en charge des relations avec le Parlement, juge au contraire que cette promulgation précipitée est tout à fait normale. « C’est la suite logique », a-t-il répondu sur France inter, confirmant le souhait de l’exécutif de passer à autre chose : « on n’a pas intérêt collectivement à revenir en permanence sur le même sujet ».
Le problème, c’est que les opposants à la réforme des retraites, politiques comme syndicaux, ne l’entendent manifestement pas de cette oreille.