Une grande partie de la classe politique continue de camper sur son refus d’y siéger sur la base des règles édictées. Les autorités de la Transition insistent sur la nécessité de se tenir à équidistance entre les forces politiques. Mais le temps presse
Deux semaines après la signature par le chef de l’État, Bah N’Daw, du décret fixant les modalités de désignation des membres du Conseil national de Transition (CNT) et de celui fixant la clé de répartition, la mise en place de l’organe législatif de la transition se fait toujours attendre. Et pour cause, la quasi-totalité des principales forces politiques du pays refuse d’y siéger. Contactés hier en début d’après-midi, plusieurs responsables politiques ont fait savoir qu’ils n’ont pas encore changé d’avis.
Il s’agit en l’occurrence d’Oumar Ibrahima Touré de l’Alliance pour la République (APR), Abdoulaye Amadou Sy de la Coalition des forces patriotiques (Cofop), Amadou Aya d’«Espérance Nouvelle-Jigiya Kura» et Daouda Touré de l’Union pour la République et la démocratie (URD). Ces leaders politiques attestent que les partis et regroupements auxquels ils appartiennent n’ont pas encore été consultés par les autorités en vue d’échanger sur la mise en place du CNT.
La rencontre du ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, le lieutenant-colonel Abdoulaye Maïga, jeudi dernier, au Centre de formation des collectivités territoriales (CFCT), avec les responsables des partis politiques, n’a pu être mis à profit pour trouver un terrain d’entente. Le ministre Maïga était accompagné par ses collègues en charge de la Réconciliation nationale, le colonel-major Ismaël Wagué, de la Refondation de l’État, chargé des Relations avec les institutions, Mohamed Coulibaly.
Cette réunion constituait une prise de contact du ministre Abdoulaye Maïga avec la classe politique. L’occasion était donc bonne pour lui de réaffirmer sa disponibilité à ses interlocuteurs à animer régulièrement le Cadre de concertation nationale aussi bien dans sa formation politique que technique. Et d’exhorter la classe politique à se mobiliser pour accompagner «le gouvernement sur les différents chantiers des réformes confiées à la Transition».
«Au demeurant, les autorités de la transition veulent la conduire avec l’accompagnement de l’ensemble des forces vives de notre nation dans la neutralité et l’impartialité», a fait savoir le lieutenant-colonel Abdoulaye Maïga.
ESPRIT CONSTRUCTIF- Dans le souci de la bonne organisation des élections générales dans notre pays, a révélé le ministre Maïga, il est envisagé la création au sein du département en charge de l’Administration territoriale et de la Décentralisation d’une Cellule d’appui au processus électoral. Cette cellule, a-t-il expliqué, pourra recevoir les contributions des différents intervenants dans le cadre du processus électoral au nom de l’inclusivité et de la transparence. Par ailleurs, il a invité ses interlocuteurs à réfléchir à la réduction des coûts de l’organisation des élections dans notre pays.
Au cours de cette rencontre, les préoccupations de la classe politique ont essentiellement porté sur le décret portant sur la clé de répartition des membres du Conseil national de la transition (CNT). En réponse, le ministre Maïga a promis de rapporter les soucis aux plus hautes autorités du pays.
De son côté, le ministre de la Réconciliation nationale a attiré l’attention sur le fait que notre pays est aujourd’hui menacé dans son existence en tant qu’État démocratique. Il a exhorté les hommes politiques à épauler les autorités de la Transition pour faire sortir le pays de la situation peu enviable qu’il traverse. « Je vous demande de nous mettre ensemble dans un esprit constructif», a soutenu le ministre Wagué qui n’a pas manqué de souligner le rôle vital des partis politiques dans la gestion du pays.
Pour sa part, son collègue en charge de la Refondation de l’État a relevé que la crise a révélé beaucoup de failles de notre système étatique. D’après Mohamed Coulibaly, «nous devrions travailler à corriger les exclusions qui ont amené la crise de l’État». Pour lui, le cumul des injustices a fait que les Maliens ont fini par ne plus avoir confiance en leur État. «Il est important aujourd’hui que dans notre démarche, nous puissions travailler à redonner à l’État sa crédibilité, à redonner aux Maliens la confiance», a invité le ministre Coulibaly qui estime, par ailleurs, qu’il y a lieu de revoir les règles du jeu politique.
Les appels des membres du gouvernement n’ont pas permis de faire bouger les lignes.
La classe politique continue de camper sur son refus de siéger au CNT sur la base des règles édictées par les décrets du président de la Transition. Les hommes politiques crient à la marginalisation, voire au mépris. De son côté, le gouvernement jure la main sur le cœur que la répartition des sièges au sein de l’organe législatif de la transition n’a obéi qu’au souci de rester à équidistance des forces politiques dont la vocation est la conquête du pouvoir.
Si le souci majeur des deux parties était de travailler ensemble pour sortir le pays de cette situation, elles devraient pouvoir arriver à un minimum de consensus. Il appartient à l’exécutif de travailler à ramener la classe politique dans la gestion de la transition. Ce n’est pas difficile de comprendre que les partis politiques entendent peser sur l’élaboration du nouveau législatif qui encadrera les prochaines joutes électorales. Il est tout aussi aisé de comprendre aussi que les dirigeants de la transition redoutent d’être taxés de favoritisme au profit d’une partie de la classe politique.
Source: Essor